L’arthroscopie du coude chez le chien
Julien CABASSU
Docteur Vétérinaire, Spécialiste en chirurgie, Diplomé ACVS et ECVS
12 avenue du Prado 13006 Marseille – Tel : 04 91 37 16 30
Introduction
Relativement aux autres articulations, le coude est une des articulations les plus simples à explorer sous arthroscopie. En effet, cette articulation n’est recouverte que par une mince couche de tissus et les repères anatomiques nécessaires à la mise en place des trocarts sont facilement identifiables. La difficulté des actes thérapeutiques peut varier en fonction du degré de l’arthrose et de la sévérité des lésions présentes. L’arthroscopie du coude est un acte chirurgical diagnostic minimalement invasif qui a l’avantage d’offrir également des possibilités thérapeutiques dans de nombreux cas. L’insertion d’une caméra dans le compartiment médial du coude permet l’observation du cartilage articulaire, l’estimation de la sévérité de l’arthrose, le diagnostic et/ou le traitement de nombreuses lésions telles que :
- La fragmentation du processus coronoïde médial.
- L’ostéochondrose du condyle huméral.
- La non union du processus anconé.
- Les lésions en miroir du condyle huméral.
- L’ossification incomplète du condyle huméral.
- Les fractures articulaires.
- Les infections et tumeurs (biopsie, rinçage articulaire).
L’arthroscopie a beaucoup apporté dans la description des lésion présentes chez les chiens souffrant de dysplasie du coude, notamment par le grossissement de images obtenues (x40) et par l’amélioration de l’observation des lésions.
Matériel
- Une tour d’arthroscopie standard (source lumineuse Xenon ou LED, caméra vidéo endoscopique, pompe d’arthroscopie ou sac à pression).
- Un arthroscope de 1,9 ou 2,7mm (voire 2,4mm), avec un angle de 30°.
- Un palpeur.
- Une pince à préhension arthroscopique.
- Une curette.
- Une fraise (ou un shaver).
Exploration sous arthroscopie
- La préparation doit être la même que pour une arthrotomie standard afin de pouvoir réaliser une telle intervention si un problème technique intervenait lors de l’arthroscopie et nécessitait la conversion en une arthrotomie.
- Le patient est positionné sur le dos et la position est sécurisée afin de pouvoir exercer une pression sur le coude pour ouvrir l’espace articulaire.
- La mise en place des champs est la même que pour une intervention standard.
- Des champs stériles roulés (ou un sac de sable placé sous les champs opératoires) peuvent être utilisés afin d’exercer un bras de levier pour ouvrir l’espace articulaire. L’assistant opératoire pourra exercer une légère pression latérale et une rotation interne durant l’intervention afin d’ouvrir l’espace articulaire.
- Deux à trois trocards sont généralement nécessaires: un trocard pour l’évacuation du liquide physiologique, un trocard pour l’arthroscope, et un trocard pour les instruments.
- Connecter l’arthroscope à la source lumineuse et à la caméra puis faire la mise au point et la balance des blancs.
- Les repères anatomiques sont pris à ce moment-là.
- Une aiguille hypodermique est placée dans l’articulation juste proximalement au processus anconé par le côté médial de l’articulation, dans une direction légèrement crânio-distale. Le liquide synovial est ponctionné à l’aide d’une seringue de 5 ml afin de vérifier l’emplacement intra-articulaire. Distendre l’articulation à l’aide d’une seringue de 20 ml remplie de liquide de Ringer Lactate. L’aiguille sera laissée en place pendant l’intervention afin de permettre l’écoulement du liquide physiologique.
- Repérer l’espace articulaire à l’aide d’une aiguille hypodermique distalement à l’épicondyle média puis inciser la peau à laide d’une lame de 11. Placer alors la chemise d’arthroscopie à l’aide d’un mandrin mousse. Faire attention à ne pas léser le cartilage articulaire lors de l’introduction de la chemise. Retirer le mandrin et placer l’arthroscope.
- Démarrer l’irrigation puis l’inspection de l’articulation.
- Démarrer l’inspection par le processus anconé en basculant le câble de la source lumineuse crânialement. Inspecter ensuite le processus coronoïde latéral, puis le condyle huméral, en particulier son rebord médial, la tête du radius, puis le processus coronoïde médial. Repérer d’éventuelles lésions en miroir sur la trochlée humérale. Observer attentivement l’aspect d cartilage en surface du processus coronoïde médial. L’aspect des villosités est également noté, afin de remarquer des signes d’inflammation articulaire.
- Une voie d’abord crânio-médiale est ensuite mise en place en fonction de la localisation des lésions observé. Une incision cutanée et capsulaire de quelques mm est réalisée à l’aide d’une lame de 11 puis le palpeur est introduit.
- Différents instruments vont être passés par cette voie d’abord crânio-médiale: une pince à préhension arthroscopique, une curette, une fraise manuelle, une lame de shaver, une pince à biopsie arthroscopique ou un ostéotome. La lésion repérée est traitée sous arthroscopie puis l’articulation est rincée abondamment à l’aide de la canule d’irrigation.
- Les voies d’abords de la chemise d’arthroscopie et des instruments sont refermés à l’aide de points cutanés seulement.
Traitement sous arthroscopie
- Traitement des lésions d’ostéochondrose
- Ces lésions sont situées sur le rebord médial du condyle huméral (rebord médial de la trochlée). La lésion peut se présenter sous différentes formes (volet cartilagineux, exposition de l’os sous-chondral, cartilage anormal et irrégulier) selon le degré d’évolution.
- Si un volet cartilagineux est présent, l’élever à l’aide d’une aiguille ou d’un palpeur puis le retirer à l’aide d’une pince à préhension arthroscopique (vidéo 1).
- Palper et cureter le rebord de la lésion si un cartilage anormal est présent. Les rebords de la lésion doivent être perpendiculaires à la surface articulaire. Cureter le lit de la lésion jusqu’à l’apparition d’un os sous-chondral sain et vascularisé (un saignement doit être observé à l’arrêt de l’irrigation) afin de favoriser la mise en place d’un fibrocartilage.
- Un microforage de la lésion peut être réalisé à ce moment-là à l’aide d’un micropick, ou une abrasion pratiquée à l’aide d’une fraise ou d’un shaver si aucune vascularisation n’est observé.
- Les lésions du processus coronoïde pourront ensuite être traitées.
- L’articulation est copieusement rincée afin d’évacuer l’ensemble des débris.
Vidéo 1 : OCD et fragmentation du processus coronoïde chez un chien.
- Traitement des lésions du processus coronoïde (variable selon le type de fissuration ou de fragmentation du processus coronoïde médial qui est observé, et selon le choix du chirurgien)
- Ces lésions peuvent se présenter sous différents aspects: fissuration, fragmentation (fragment en place ou déplacé), chondromalacie, os nécrosé (vidéo 2).
- Elever le fragment à l’aide d’un palpeur ou d’une aiguille, puis le libérer de ses attaches tissulaires.
- Retirer le fragment à l’aide d’une pince à préhension (parfois le fragment sera extrait en plusieurs parties).
- Cureter le rebord de la lésion ainsi que l’ensemble du cartilage et de l’os sous-chondral anormal au niveau du processus coronoïde médial.
- Selon les résultats des examens d’imagerie et de l’observation arthroscopique, pratiquer une ostéotomie subtotale du processus coronoïde médial à l’aide d’un ostéotome puis retirer le fragment (si indiquée par les examens d’imagerie ou les lésions observées lors de l’arthroscospie) (vidéo 3).
- Pratiquer une ténotomie du tendon d’insertion ulnaire du muscle biceps si indiquée par les lésions observées lors de l’arthroscopie et selon la décision du chirurgien.
- L’articulation est copieusement rincée afin d’évacuer l’ensemble des débris.
Vidéo 2 : différentes lésions du processus coronoïde chez le chien.
- Traitement d’une ossification incomplète du condyle huméral, d’une non-union du processus anconé, d’une fracture intra-articulaire sous guidage arthroscopique
- La réduction puis la mise en place des implants pourra être réalisée sous assistance arthroscopique afin d’observer la mise en compression des fragments et d’éviter le placement d’implants dans l’espace articulaire.
- Exploration d’une arthrite septique ou d’une suspicion de tumeur intra-articulaire
- Prélèvement de liquide synovial en vue d’une analyse cytologique et bactériologique.
- Exploration de l’articulation et biopsie de tissus (villosités synoviales, cartilage ou os anormal) en vue d’une analyse cytologique et/ou bactériologique).
- Rinçage articulaire abondant sous guidage arthroscopique.
Vidéo 3 : coronoïdectomie subtotale chez un chien.
Mots-clefs : arthroscopie, cabassu, chien, chirurgie, coronoïde, dysplasie, ECVS, ocd